samedi 11 décembre 2010

UNE HISTOIRE - DEUX RECITS

Dans les couloirs du Palais de Justice, un homme et une femme attendent que leur divorce soit prononcé.
Raconter en adoptant le point de vue de l'homme puis le point de vue de la femme.

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LUI
Qu’il fait froid dans ces couloirs, c’est plein de courants d’air. Je ne voulais pas m’encombrer d’un pardessus mais si l’attente dure je vais peut-être le regretter. J’ai hâte d’être sorti d’ici et de retourner au café du tribunal. Et l’avocat... avec tout ce que je lui donne il pourrait au moins être à l’heure. Je n’ai plus qu’à me trouver un banc pour patienter... J’ai un peu de mal à tenir en place. C’est moi qui l’ai provoqué ce divorce mais j’ai une boule au creux de l’estomac. 25 ans de vie c’est pas rien. Tiens cette voix pleurnicharde au milieu du groupe là bas, c’est elle. Je la reconnais bien : flanquée de « ses bonnes amies » les vieilles commères. Comme si je me faisais accompagner par les potes du foot. Les yeux rougis, à qui elle veut faire pitié ? D’accord je l’ai trompée pendant un bon nombre d’années mais elle l’a bien cherché, marre de la soupe à la grimace et de l’hôtel du « cul tourné ». Elle aurait quand même pu faire un effort de toilette pour l’occasion : encore son vieux manteau gris tout râpé et son foulard. Ça ma fait drôle qu’elle ait mis ce foulard à fleurs. Je me demande si elle se souvient que c’est moi qui lui aie offert. C’était un dimanche avant d’aller danser, on ne se connaissait pas depuis longtemps, j’étais fier de lui faire un cadeau, je nous voyais déjà parti pour une vie de bonheur et j’avais pas les moyens pour une bague.
Dommage qu’elle se soit douté de quelque chose. J’aurais bien continué comme ça : un peu de douceur les soirs où elle était occupée avec les bonnes œuvres, et les soirées télé le reste du temps. Depuis le temps, je m’étais fait une raison : le mariage c’est pas le paradis mais les habitudes c’est reposant.

ELLE
Ah ! il est déjà là, il a l’air bien pressé que ce soit terminé. Il se prend pour un jeune homme à se promener en veston par ce froid. Moi je ne regrette pas d’avoir ressorti ce vieux foulard en laine. Il était d’ailleurs bien joli ce châle à fleurs. Ça doit être une lubie de sa nouvelle poule de lui faire porter des chemises à rayures. Comme si ça pouvait l’affiner, je parie qu’il ne porte même plus de bretelles.
Je ne lui ferai pas de cadeau : la banquette, la télévision et le frigidaire resteront à moi. Ça vaut bien les heures de ménages et de cuisine au service de monsieur. C’est bien beau, mais qu’est ce que je vais devenir toute seule. Les enfants ne lui donnent même pas vraiment tort. C’est pourtant lui le fautif : fréquenter dans mon dos pendant que je m’occupe des pauvres de la paroisse, c’est vraiment dégoutant quand j’y pense. J’aurais du me douter que ça finirait mal ; depuis toujours il ne pense qu’à ça, heureusement que je ne me suis pas laissée faire...  il a quand même réussi à me faire cinq gosses. Sa nouvelle poule, elle va aimer ça combien de temps ?

Françoise Bourdon

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Il n'avait pas entendu le réveil sonner ou peut–être s'était-il rendormi ou avait–il simplement oublié
de le mettre à l'heure la veille au soir. Il serait en retard.
Elle allait encore lui jeter un de ses regards qui rendait ses yeux bleus, plus noirs que le jais.
Il avait sauté dans ses vêtements puis dans un taxi et était maintenant assis dans ce couloir entouré
de couples qui s'épiaient.

mercredi 8 décembre 2010

LA VENUS HOTTENTOTE






Ecrire un texte à partir de la photo du moulage du corps de la Vénus Hottentote.


Poème, évocation, récit, chronique...















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Que veulent ils tous, qui m'observent comme une bête, leurs yeux comme des mains sur ma peau?
Qui croient ils que je suis? Un animal? Un corps sans âme?
Sais tu , toi dont les yeux brulent de désir, que coule sous ma peau noire un sang aussi rouge que
celui que charrie ta peau blanche.
Que sais tu de moi, des pensées qui roulent sous mon crâne, de ma douleur, de l'humiliation d'être
exposée aux regards torves, aux railleries grossières, à la concupiscence des hommes, aux rires des
enfants, à la jalousie des femmes.
Heureusement , avec les piqures du docteur je n'ai plus mal, je n'ai plus peur. Je ne sens plus rien.
Je flotte.
Je retourne au Cap. Je n'ai plus froid.
Plus froid, plus mal. Plus froid, plus mal. Plus froid, plus mal.
L'ours a fini sa danse . A mon tour maintenant.
Regarde les s'attrouper, s'agglutiner comme des poissons pris au filet.
Venez voir la négresse! La négresse haut les fesses!
Je ne sens même plus le fouet.
De toute façon j'aime mieux danser qu'être là, sans bouger , prisonnière dans leurs yeux.
Allez danse!danse! danse
Danse ma tête,
danse mes bras,
danse mes jambes,
danse mon corps,
Dansent mes mains, mes reins, mes seins.
Danse , danse, danse
Je ne vois plus rien, je ne sens plus rien,
Je ne vois plus rien, je ne sens plus rien,
Je ne vois plus rien, je ne sens plus rien,
Je ne suis plus rien

L. B.
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