mercredi 8 décembre 2010

LA VENUS HOTTENTOTE






Ecrire un texte à partir de la photo du moulage du corps de la Vénus Hottentote.


Poème, évocation, récit, chronique...















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Que veulent ils tous, qui m'observent comme une bête, leurs yeux comme des mains sur ma peau?
Qui croient ils que je suis? Un animal? Un corps sans âme?
Sais tu , toi dont les yeux brulent de désir, que coule sous ma peau noire un sang aussi rouge que
celui que charrie ta peau blanche.
Que sais tu de moi, des pensées qui roulent sous mon crâne, de ma douleur, de l'humiliation d'être
exposée aux regards torves, aux railleries grossières, à la concupiscence des hommes, aux rires des
enfants, à la jalousie des femmes.
Heureusement , avec les piqures du docteur je n'ai plus mal, je n'ai plus peur. Je ne sens plus rien.
Je flotte.
Je retourne au Cap. Je n'ai plus froid.
Plus froid, plus mal. Plus froid, plus mal. Plus froid, plus mal.
L'ours a fini sa danse . A mon tour maintenant.
Regarde les s'attrouper, s'agglutiner comme des poissons pris au filet.
Venez voir la négresse! La négresse haut les fesses!
Je ne sens même plus le fouet.
De toute façon j'aime mieux danser qu'être là, sans bouger , prisonnière dans leurs yeux.
Allez danse!danse! danse
Danse ma tête,
danse mes bras,
danse mes jambes,
danse mon corps,
Dansent mes mains, mes reins, mes seins.
Danse , danse, danse
Je ne vois plus rien, je ne sens plus rien,
Je ne vois plus rien, je ne sens plus rien,
Je ne vois plus rien, je ne sens plus rien,
Je ne suis plus rien

L. B.
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1.

Il se regarde dans la glace.
Ses dents se retroussent sur un rictus, ses yeux roulent.
Être tout le monde, sauf lui.
À la fac aujourd'hui, une étudiante de sa section lui a dit :
Alors, tu as voulu te blanchir en te mariant avec elle ?

2.

Il adore l'Allemagne. On lui refuse l'entrée dans les boîtes de nuit.
Mais dès qu'il parle, tout le monde se tait : il s'exprime dans une
langue d'une pureté exceptionnelle, avec un accent incomparable.

3.

Il attend à la clinique. Ses collègues à elle finissent par l'emmener.
Viens chez nous. Ça ne sert à rien que tu attendes dans ce couloir.
Chez eux, il boit. Beaucoup. Puis il se met à chanter. Des chants de sinistre
mémoire. Il se met ensuite à marcher au pas de l'oie sur le parquet des
collègues tétanisés.
Ceux-ci auront beaucoup de mal, le lendemain, à regarder dans les yeux
la jeune accouchée.

4.

Il avait eu honte de son état, l'avait laissée marcher devant dans le métro. Seule,
elle et son gros ventre.
Elle avait compris le sort qui les attendait tous les trois.

5.

Elle revient du travail et va voir le bébé.
Elle crie.
-         Sa tête est énorme !
Elle l'appelle.
-         Que s'est-il passé ?
-         Rien.
Elle hurle :
-         Sa tête ! Sa tête !
Elle avait doublé de volume.
Elle bondit, enveloppe l'enfant n'importe comment et va droit à l'hôpital.
-         Il a une petite fracture du crâne. Rassurez-vous, madame, ça n'aura pas d'incidence.
Plus tard :
-         Oh rien, il braillait, alors je lui ai donné à manger, je l'ai changé, mais comme il continuait...
Elle apprendra le lendemain qu'il l'avait jeté par la fenêtre comme le chat quinze jours plus tôt.
Elle se revoit chez le vétérinaire, avec le chat, la patte dans le plâtre...

Bernadette Behava

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RESERVE  / 3° SOUS-SOL / Secteur Afrique / Caisse n°1789

Sur quelles images tes paupières se sont fermées ?
Sur quels reproches tes lèvres se sont closes ?
Ils ont cru te posséder, t’observer, te détailler, te disséquer, sans savoir que d’eux tu avais compris la petitesse, la laideur, la vulgarité.
 C’est pour échapper à ton regard qu’ils ont fermé la caisse. Tu les a mis à nu.
Le remord du plus modeste t’a drapée de toile bleue avant que par le ciel tu rejoignes ta terre, tes racines.
Ils ont cru tenir le chainon manquant, posséder un phénomène de foire, assouvir leurs obscurs besoins ; ils n’ont pas imaginé que l’éclat de la perle noire pouvait rejaillir sur eux et éclairer leurs vies et le devenir de l’humanité.
La honte m’envahit, dans un geste d’apaisement et de fraternité, j’ai envie de prendre doucement cette main que tu avances vers nous.

Françoise Bourdon

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