mardi 19 octobre 2010

D'APRES BLOTTER DE PETER DOIG





Écrire un texte d'après cette œuvre du peintre Peter Doig.
S'inspirer du tableau, sans s'y enfermer mais au contraire en ouvrant toutes les portes qu'il peut ouvrir.
Partir de l'atmosphère générale du tableau, du personnage, de ce qui se cache derrière la forêt, d'un détail, une couleur, une branche couverte de glace...







......................................................................................................



Que cherche-t-elle figée par son reflet ?
N’a-t-elle pas vu le ciel, griffé par les grands arbres nus ?
Attend-elle de s’enfoncer dans son image ?
Est-elle à l’affut du meilleur endroit pour creuser un trou et pêcher ?
NON !
Elle guette le nombril du monde que l’on ne voit que quand la terre noire et épaisse laisse la place à la glace lumineuse. Mais son regard est arrêté par son nombril à elle qui se reflète dans le miroir glacial.
Si j’osais……………
Je descendrais sur la glace, je l’entrainerais dans la danse de la vie, je lui raconterais les ruisseaux qui continuent de courir sous la glace profonde ; les nuages qui effacent le sillage des oies sauvages ; le soleil fidèle à sa course céleste même s’il ne réchauffe pas.
Comment lui expliquer que ce qu’elle cherche sous ses pieds, c’est en levant les yeux qu’elle le trouverait ; que la lumière de la glace est dans celle des astres ; que son image glacée risque de l’absorber au point de faire disparaitre la forêt qui l’entoure, d’anéantir l’horizon, de la réduire à un point autour duquel s’enroule l’univers.
La lune est là, au dessus des grands arbres nus et sur la glace devenue noire. C’est elle qui va la ramener au monde en la baignant de sa lumière argentée.
Un premier frisson va l’animer
Un mouvement sur le côté va la capter
Le sang se remet à circuler dans ses veines
L’engourdissement disparait
Elle est prête à suivre cette vie tiède qui palpite entre les grands arbres
Heureuse elle découvre la renarde et ses petits, elle ne veut pas les effaroucher, juste danser avec eux dans la froide lumière de la lune.

Françoise Bourdon
.................................................................................................................
                                                                                                                   


À l'église

L'église est glaciale comme les yeux du curé qui les fixent. Elles s'ennuient, alors elles pouffent, se tortillant sur leur chaise paillée.
-  Dominum vobiscum !
Elles ont du mal à suivre dans le missel où tremblent des images. C'est plus fort qu'elles : ils faut qu'elles gigotent, qu'elles se trémoussent.
Elle a l'impression que les yeux globuleux du curé les transpercent. On dirait un crapaud.
Va-t-il bondir sur elles ?
Elle a froid. Elle tire ses manches pour tenter de couvrir ses doigts gourds.
En rentrant, elle ira se réchauffer près de la cuisinière à charbon, dans la cuisine, seule pièce chauffée de la maison.
Le curé la regarde sans ciller. Elle doit se calmer, ne plus distraire sa sœur. Surtout ne plus se faire remarquer. Elle n'a de toute façon aucune envie de s'amuser.
À sa gauche, un grand Christ en croix. Le plâtre est vivant, du sang coule. Elle a mal au coeur. Elle voudrait détourner les yeux de l'horrible spectacle mais elle ne le peut pas. Elle est tétanisée.
En surimpression, elle voit son père qui prend les petits chats nouveau-nés et les lance contre le mur de la maison. Chaque jour, elle passe devant les traces noirâtres qui mettent du temps à disparaître. Comme quand il l'entraîne dans la cave où le lapin pendouille, la peau retournée, son sang coulant dans un bol goutte à goutte.
-  Bois, ça te fortifiera.
Elle ne peut échapper à la boisson saumâtre. Il n'y a pas d'issue.
Le parfum de l'encens lui fait tourner la tête. Elle ferme les yeux, les narines offertes.
Oublier. S'imaginer qu'elle est ailleurs. C'est difficile, elle n'y arrive pas.
S'asseoir, se relever, s'agenouiller, se rasseoir. Elle fait ce qu'il faut, s'alignant sur les autres.
Elle glisse un œil sur son voisin de gauche, puis sur celui de droite, assis à côté de sa sœur
Ils ont l'air concentré, comme à l'école. Ils se tiennent un peu voûtés, les yeux baissés. À quoi peuvent-ils penser ?
-  Tu prieras pour moi, lui a demandé sa mère.
Prier ? Dieu ne lui plait pas. Elle n'aime pas qu'il sache ce qu'elle pense, partout et tout le temps.
-  Dieu vous aime comme un père, leur a dit le curé au catéchisme.
Comme un père ? Elle avait bien besoin de ça. Elle sait comment son père l'aime à la maison.
Toute envie de chahuter avec sa sœur a depuis longtemps disparu. Celle-ci, transie de froid, se tient recroquevillée sur sa chaise inconfortable. Elle a beau lui donner des coups de coude à la génuflexion, rien n'y fait. Mais comment peut-elle dormir ?
Le curé ne les regarde plus : ils donnent une sorte de dragée à des gens qui attendent, à la queue-leu-leu, la bouche ouverte, la langue tirée. Elle n'a pas envie de faire la queue.
Boire à la coupe après ne la tente pas non plus. Qu'y a-t-il dedans ? Le garçon en robe à côté du curé a beau en essuyer le bord après que chacun en a bu une gorgée, elle en a le cœur au bord des lèvres.
Ce n'est pas le moment de vomir. Se retenir. Endurer.
Si elle pouvait, elle taperait des pieds. Elle n'ose pas. Il y a un tel silence ! Ses chaussettes sont trempées. La neige, dehors, a pénétré dans ses godillots. Elle pense à la brique chaude qu'elle se mettra sous les pieds en rentrant, aux chaussettes fumantes au-dessus de la cuisinière de la cuisine. Tant pis pour les engelures. Elle les percera avec une épingle. Ce sera plus fort qu'elle. Mais ça fera mal.
La messe s'éternise. Elle a hâte d'être dehors, de prendre sa sœur par la main, de courir sur le sol gelé. Elle n'aura pas le cœur de jouer avec la neige. De toute façon, c'est de la bouillasse. Et c'est laid, la bouillasse.
Une pensée la taraude : elle ne fait pas confiance au curé. Elle sait qu'il est le relai du père. Celui-ci les a bien prévenues :
-  Je vais vous dresser, moi ! Ça mettra le temps qu'il faudra mais j'y arriverai !
Il espère que la religion les rendra plus dociles. Il compte sur le curé pour cela.
Elle tremble de froid et de peur. Elle sait que, comme d'habitude, le curé dira pis que pendre d'elles et que ce sera la torgnole assurée. Pour changer.



Bernadette Behava

.....................................................................................................................

HE HO HE HO!!!! Où êtes vous?
C'est pas rigolo, répondez! HE HO HE HO!!!!
Hoohoohoohoo
Mais où sont ils passés?
Si vous ne répondez pas, je vous préviens je rentre moi. C'est vraiment pas drôle là.
Pierre? Sylvia?
Je dirai à maman que vous m'avez laissé tout seul. Vous serez grondé.
Peut-être qu'ils m'ont abandonné? Abandonné comme le petit Poucet.
Les cailloux blancs c'est bien au printemps mais je défie le petit Poucet tout malin qu'il est de retrouver son chemin dans toute cette neige.
J'ai froid - J'en ai assez - Je veux rentrer -J'suis fatigué.
Je crois que je suis déjà passé par là. On dirait que je tourne en rond. Des arbres des arbres des arbres, rien que des arbres. Des arbres derrière, des arbres devant. Des arbres et du blanc
HE HO!!!!Hoohoohoohoo
1 km à pied ça use, ça use, 1 km pied ça use les souliers!!!
2 km à pied ça use, ça use, 2 km pied ça use les souliers!!
3 km à pieds....!
J'ai les pieds glacés.
Les pieds et les mains. J'arrive même plus à bouger mes doigts.
Y sont tout raides comme les pattes de mon canari quand il était mort couché sur le
dos dans sa cage.J'ai froid. De plus en plus froid.
Comme le ciel est beau avec toutes ses étoiles qui scintillent. Y paraît que ce sont les yeux des morts qui nous regardent de là haut.
J'en peux plus. Là , je crois que je suis vraiment perdu.
Un, deux , trois j'irais plus au bois.
Tu parles d'une partie de cache cache.
Mon nez arrête de couler. Mes yeux arrêtez de chialer.
Je vais me reposer , juste un peu. Je vais me glisser dans la neige comme sous la
couette dans la chambre de maman.
C''est pas froid du tout, c'est tout doux
Dormir, juste un peu. Un tout petit peu.
Il neige. C'est drôle je ne sais plus si la neige tombe du ciel ou si elle monte vers lui.
Et cette femme qui est-elle?
Comme elle est belle.
Elle ressemble à maman.
Je savais qu'elle viendrait me chercher.
L. B.

Aucun commentaire: